Une bouchée d’Almanach : Août

Chaque mois, nous vous dévoilerons quelques morceaux du Solide Almanach Nourricier 2021.
Des petites bouchées, issues des trente-deux saisons du Solide Almanach : des Orts de Pierre, des Adresses de l’Étonnant, des Rencontres cuisinées, des questions de l’Impitoyable Jeu de l’Oie Confite, bref, des petits bouts d’Almanach, à savourer trois fois par mois !

Bouchée n°3 – publiée le 31 août 2021

La fin août, Mycophages, deuxième service

Crédits : L’Étonnant Festin

 » C’est une combinaison complexe, un peu de lune, pas mal d’eau, du soleil, tout ça fait qu’ils apparaissent à la fin de l’été : les champignons.

Et puis pas de la même manière et pas les mêmes espèces suivant les massifs, les bois, les forêts, ils peuvent pousser en colonie, en groupe, en rond ou isolés.

S’ils sont encore parfois une activité économique rurale de complément, ils sont souvent une histoire de passion, d’envie et provoquent aussi des querelles de voisinage entre gens des villes et gens des campagnes et interrogent sur la propriété de ce qui pousse dans les bois. Chanterelles, girolles, cèpes, marasmes, lactaires, pieds de mouton, dès le milieu de l’été suivant les années, vont donner un goût d’automne.

Tout comme les mirabelles, ces petites prunes au parfum de miel, que l’on croque en passant à côté de l’assiette qui les accueille ou qui permettront de belles tartes dorées ou des confitures précieuses pour parfumer un yaourt fermier ou pourquoi pas un fromage de chèvre très frais.

Enfin, ils apparaissent, dodus, souvent vivement oranges, les courges et potirons.

Ils font envie en gratin doré mais presque avec un goût de regret car ils sont déjà l’automne. »

Crédits : L’Étonnant Festin
Crédits : L’Étonnant Festin

Texte d’introduction, saison ”La fin août, Mycophages, deuxième service ”, p.96 du Solide Almanach Nourricier 2021


Bouchée n°2 – publiée le 17 août 2021

Souvenirs d’écrevisses

« Il y a quelques années Marcel Rufo, célèbre pédopsychiatre originaire de Toulon, évoquait, dans un entretien où nous lui demandions de parler de cuisine populaire, le glissement de plats populaires, familiaux, devenus des plats rares et chers.

Il nous disait :  » pour moi, ce sont des plats de fêtes à l’origine assez populaires qui sont devenus des préparations de riches. Je pense à la langouste à l’armoricaine de ma grand-mère, c’est un plat qui me rend fou. Il y a aussi le stockfish cuisiné avec des patates, des cœurs de fenouil et de l’huile d’olive. L’aïoli aussi. Tous ces plats sont devenus trop chers. J’allais oublier le saint-pierre à la toulonnaise avec un lit de citron, des patates et assaisonné de câpres au sel. Aujourd’hui tous ces plats sont chers, voire rares, pourtant ils sont inscrits dans un univers culinaire et populaire (1). »

Ainsi, des produits, souvent sauvages comme ceux que cite Marcel Rufo, ont quitté l’univers d’une cuisine populaire pour devenir, par leur rareté et donc leur coût, des marqueurs d’une cuisine réservée à l’exceptionnel et à ceux qui peuvent se l’offrir.

De nombreux Auvergnats ont ainsi le souvenir jusque dans les années 1970 de pêches à l’écrevisse dans les ruisseaux aux eaux oxygénées de montagne qui permettaient de se régaler de dizaines de ce petit crustacé d’eau douce. Juste saisies au beurre et flambées, ou encore dans une sauce riche d’échalotes, de tomates et de vin blanc, elles étaient le marqueur d’une cuisine certes de fêtes, qu’une fois par an le 15 août, mais populaire.

En jetant un coup d’œil à La Haute-Loire pittoresque, touristique et gourmande parue en 1949, la grande majorité des restaurants cités mentionne qu’ils servent des écrevisses. Interdit et bien sûr inconcevable aujourd’hui. Mais ces écrevisses des ruisseaux auvergnats ont vu leurs populations s’effondrer, se réduire comme peau de chagrin. Nous ne pourrons plus goûter à leur chair et les préserver, les protéger est devenu la seule réalité.

Pourquoi ?

Peut-être une sur-pêche, certainement des pollutions diverses et nombreuses pour l’espèce autochtone exigeante en qualité de l’eau, et surtout les lâchers et l’expansion des espèces d’écrevisses venues d’ailleurs et de leurs maladies.

Aujourd’hui les écrevisses sont américaines, ou quand vous achetez des queues décortiquées, pré-cuites sous atmosphères modifiées, en provenance de Chine ou de Turquie.

Les écrevisses et leur cuisine, au sens de leur goût cuisiné, ont gagné la bibliothèque des souvenirs, comme la preuve que notre alimentation et la préservation de l’environnement sont intimement liées dans leur complexité, leur diversité et leur nécessité.

Nous avons demandé à la Fédération du Puy-de-Dôme pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique de dresser un état des lieux des écrevisses dans le Puy-de-Dôme :

Autrefois abondante sur la quasi-totalité du réseau hydrographique puydômois, l’écrevisse autochtone, l’espèce d’écrevisse à pattes blanches, ne survit plus que dans certains ruisseaux préservés. Elle bénéficie de nombreux statuts de protection aujourd’hui mais la dégradation des écosystèmes aquatiques et l’introduction d’écrevisses exotiques plus agressives, plus fécondes, moins exigeantes en termes de qualité de milieu et porteuses saines de certaines maladies ont eu raison de la plupart des populations.

Depuis plus de 20 ans, la pêche à la balance de cette écrevisse n’est plus possible et interdite.

Actuellement dans notre département on trouve 5 espèces d’écrevisses :

  • L’écrevisse à pattes blanches (autochtone) évoquée précédemment.
  • L’écrevisse à pattes grêles (introduite mais intégrée à la liste des espèces présentes en France) qui affectionne certaines ballastières du Val d’Allier.

Et 3 espèces exotiques envahissantes :

  • L’écrevisse américaine.
  • L’écrevisse californienne, écrevisse signal ou écrevisse du Pacifique.
  • L’écrevisse de Louisiane ou écrevisse rouge de Louisiane. »

En collaboration avec la Fédération du Puy-de-Dôme pour la Pêche et la Protection du Milieu Aquatique

(1) Cet entretien a été réalisé en 2013 pour le site de l’OCPop dans la rubrique titrée « La cuisine populaire vue par.. ».

Texte d’introduction, saison ”15 août”, p.94 du Solide Almanach Nourricier 2021


Bouchée n°1 – publiée le 6 août 2021

L’Ort de Pierre du mois d’août, par Pierre Feltz

Crédits : Franck Watel

 » Ça brûle ! Tous à l’ombre, tous à l’eau ! On ne badine pas avec nos mois d’août qui enchaînent les records.

Canicules et orages violents, le cocktail maudit.

On cherche la parade. Récupération de l’eau du ciel, citernes et bidons. Les tuyaux sont de sortie : celui de l’arrosage au jet direct, le goutte-à-goutte installé durablement, le microporeux qui transpire, les asperseurs qui douchent les enfants de passage, trop heureux des jeux d’eau.

Les ombrières deviennent d’usage courant. Au potager, c’est cagettes sur cardes, pergolas protectrices, lianes couvrantes …

Cette eau qui manque tant arrive, soudain, en trombe. Si la grêle n’accompagne pas le déluge, c’est le grand soulagement.

Les paillages ont amorti l’impact de l’eau : ni ruissellement, ni tassement, pas plus que d’érosion dévastatrice ; la matière est une éponge, et dessous, ça jubile ! « 

Crédits photos : Serge Carton

L’Ort de Pierre, saison ”Août”, p.88 du Solide Almanach Nourricier 2021

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